Bienvenue

A l'ombre du serpent des blés et autres serpents-rois, de nombreuses couleuvres de l'ancien genre Elaphe sont de véritables perles d'intérêt en terrarium. De taille modeste, au comportement intéressant et aux motifs agréables, ces serpents sont moins fréquemment détenus en France malgré leur facilité d'élevage.
Ce site a donc pour but de vous présenter mon expérience avec ces quelques espèces et leur élevage, en espérant qu'elle sera utile à d'autres éleveurs enthousiastes. Bien entendu, appliquer des fiches d'élevage ne représente absolument pas une garantie de résultats : l'expérience peut être sensiblement différente en fonction des spécimens au sein d'une même espèce. La perception du soigneur est indispensable pour ajuster les paramètres d'élevage en fonction du comportement. Dans l'absolu, la première chose que doit faire un éleveur consciencieux est de rassembler le plus de notes possibles concernant l'histoire naturelle de l'espèce : écologie, éthologie, physiologie et reproduction, milieu de vie et microclimat, alimentation etc. Avoir une vue d'ensemble la plus large possible permet d'appréhender plus sereinement les variables indispensables en captivité.
Enfin pour les personnes qui comme moi aiment la lecture, j'ai indiqué dans la partie "bibliothèque" les ouvrages que j'ai pu acquérir au fil du temps, avec quelques lignes de commentaire pour chacun.

Taxinomie changeante

La taxinomie des ophidiens dans sa globalité a été quelque peu chahutée depuis plusieurs années, et risque de l'être pendant encore quelques temps. L'utilisation relativement récente et massive des outils de biologie moléculaire a singulièrement modifié les classifications auparavant obtenues uniquement par des méthodes morphologiques. Ces outils, seuls ou complétés par l'anatomie comparée, permettent une meilleure résolution des liens de parentés entre espèces, genres et familles et sont donc extrêmement utiles dans le cadre de la classification phylogénétique.
Pour l'éleveur amateur ces modifications paraissent souvent sans intérêt : trop abstraites, trop compliquées ou ambigues, ou simplement sans intérêt direct avec l'élevage. Pourtant cette science en continuel mouvement est le reflet de ce que l'on apprend, et comprend, sur les relations interspécifiques et inter-génériques de nos pensionnaires, sur leurs origines et leurs affinités génétiques. Une meilleure connaissance de ces relations permet une meilleure recherche d'informations, mais aussi une meilleure gestion des espèces en captivité, en évitant des reproductions entre populations très différentes par exemple, même si les spécimens font a priori partie de la même espèce. L'histoire de l'herpétoculture est ainsi jalonnée d'hybridations obtenues dans l'ignorance, qui concernent toutes les classes de reptiles à l'exception du Sphénodon (certainement parce que c'est la seule espèce de la classe des Rhynchocephalia !).
Le genre Elaphe n'a bien entendu pas échappé aux bouleversements taxinomiques. Communément regroupés sous le nom de "serpents ratiers" depuis 1894 (Boulenger), il faudra attendre jusqu'en 2002 (Utiger et al.) pour voir le genre entièrement remanié. La dernière révision date de 2017, oblitérant le genre Orthriophis en replaçant les espèces dans le genre Elaphe ( voir Chen et al.).
A l'heure actuelle le genre Elaphe comporte 15 espèces : E. anomala, E. bimaculata, E. cantoris, E. carinata, E. climacophora, E. davidi, E. dione, E. hodgsoni, E. moellendorffi, E. quadrivirgata, E. quatuorlineata, E. sauromates, E. schrencki, E. taenuria et E. zoigeensis.
Par la force de l'habitude, ainsi qu'une certaine inertie, beaucoup d'espèces appartenant anciennement à ce genre sont toujours appelées des "Elaphe".

Etymologie

[...] Au-delà de l'étiquette, qu'il est par définition, le nom esquisse la classification à son niveau le plus intime et oriente le systématicien dans le labyrinthe de l'évolution... Ellipse féconde, la nomenclature binomiale rappelle les analogies tout en marquant les différences.
- Jean-Pierre Chippeaux, in Rémi Ksas. 2015. L'étymologie des noms latins des serpents. Venom World Editions.


Bien que je n'imagine pas un systématicien visiter ce site, je sais qu'un amateur éclairé aura autant de plaisir à découvrir l'origine d'un nom, ou à tirer des enseignements de celui-ci sans même avoir vu l'animal. Les noms scientifiques, aussi barbares qu'ils puissent paraître, sont autant d'indications sur l'animal. En plus des indications de parentés (genre) et de singularisme (espèce), ils peuvent aussi indiquent les couleurs, les formes, le comportement ou le milieu de vie ; ils illustrent parfois des naturalistes, connus ou non et donnent ainsi des indices sur la découverte de l'espèce.
L'étymologie des noms d'espèce est indiquée dans la page qui leur est consacrée, voici pour les noms de genre :

Elaphe Fitzinger, 1833 (féminin) : Schulz (1996) indique que le nom de genre est dérivé du grec ελαφος (Elaphos) qui signifie "Cerf". Fitzinger n'a malheureusement pas donné de raison particulière pour le choix de ce nom. La tête de l'espèce type, Elaphe sauromates, étant comme de nombreux autres colubridés de ce genre ornée d'un motif rappelant une ramure de cervidé, il est possible que le nom ait été choisi pour celà.
Lescure & Le Garff (2006) indiquent quant à eux que ce nom est une déformation du grec ελοψ (Elaps) désignant un serpent inoffensif, et utilisé par Aldrovandi pour nommer Elaphe quatuorlineata dans son oeuvre posthume Serpentum et Draconum historiæ libri duo (1640).

Pantherophis Fitzinger, 1843 (masculin) : du grec πανθηρος (Pantheros) : panthère, et οφις (Ophis) : serpent, en référence à l'espèce-type décrite par Daudin (1803) Coluber pantherinus (actuellement Pantherophis guttatus) nommée ainsi à cause de ses taches.

Zamenis Wagler, 1830 (masculin) : du grec ζαμενης (zamenês) : irascible, violent. L'éleveur de Zamenis au sens actuel s'étonnera de voir une telle définition accolée au genre puisque ces couleuvres, même si elles peuvent parfois se montrer mordeuses, ne sont pas spécialement agressives. Wagler, dans sa description, indique en nom générique "Aesculapschlange" (la couleuvre d'Esculape), mais mentionne deux espèces : la couleuvre d'Esculape (actuellement Zamenis longissimus) et la couleuvre verte-et-jaune (actuellement Hierophis viridiflavus). Quiconque a déjà capturé cette dernière conviendra que le qualificatif lui convient à merveille. (Natürliches System der Amphibien : mit vorangehender Classification der Saügethiere und Vogel : ein Betrag zur vergleichenden Zoologie)

Remerciements

Merci à Andy Fichet, à Ludwig Pastor, à David léger, et à Robert Seib pour le prêt de leurs photographies.